Série ES
1er sujet
Mes désirs m’appartiennent-ils ?
2eme sujet
La religion est-elle une production culturelle comme les autres ?
3ème Sujet
Expliquer le texte suivant
Il y a une liaison dans les perceptions des animaux qui a quelque ressemblance avec la raison ; mais elle n’est fondée que dans la mémoire des faits ou effets, et nullement dans la connaissance des causes. C’est ainsi qu’un chien fuit le bâton dont il a été frappé parce que la mémoire lui représente la douleur que ce bâton lui a causée. Et les hommes, en tant qu’ils sont empiriques, c’est-à-dire dans les trois quarts de leurs actions, n’agissent que comme des bêtes ; par exemple, on s’attend qu’il fera jour demain, parce qu’on l’a toujours expérimenté ainsi. Il n’y a qu’un astronome qui le prévoie par raison ; et même cette prédiction manquera enfin, quand la cause du jour, qui n’est point éternelle, cessera. Mais le raisonnement véritable dépend des vérités nécessaires ou éternelles, comme sont celles de la logique, des nombres, de la géométrie, qui font la connexion indubitable des idées et les conséquences immanquables. Les animaux, où ces conséquences ne se remarquent point, sont appelés bêtes ; mais ceux qui connaissent ces vérités nécessaires sont proprement ceux qu’on appelle animaux raisonnables, et leurs âmes sont appelées esprits.
Leibniz, Principes de la nature et de la grâce
La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise. Il faut et il suffit que l’explication rende compte, par la compréhension précise du texte, du problème dont il est question.
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Cette année 2012, avant le bac de la métropole, on constate un certain nombre de sujets sur la religion. On pourra lire sur ce site et les conditions qui rendent possible la religion et une problématisation d’un sujet tombé à Pondichéry.
Si l’on note les conditions de possibilité de la religion, il n’est pas difficile de trouver des éléments qui font de la religion une production culturelle parmi d’autres mais aussi des conditions de possibilité qui prétendent échapper à toute détermination culturelle (par exemple la transcendance).
Si la religion n’est qu’une production culturelle, elle est immanente à ce qui la produit, ce qui la détruit en tant que religion. Pour être une religion au sens fort du terme, il faut qu’elle trouve sa source dans un principe transcendant qui excède tout ce qu’il peut y avoir de culturel en elle. On voit donc bien le problème et l’enjeu d’un tel sujet.
Pour construire des thèses différentes, il sera facile de jouer sur les deux dimensions possibles de la religion :
– la religion comme institution avec ses dogmes, son organisation : cela bien évidemment est une production culturelle comme une autre qui décide de qui commande, qui décide aussi des modalités d’exercice de ses prêtres (ils peuvent se marier ou non), de permettre ou non aux femmes d’accéder à telle ou telle fonction etc.
– la religion comme foi et qui se réfère à un principe transcendant, au-delà de tout ce qui est culturel, bref, méta-physique.
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Quant au texte de Leibniz, on pourra lire ce que nous avons écrit par ailleurs sur la raison. Les animaux n’ont qu’une connaissance par les sens (empirique) qui leur font associer, grâce à la mémoire, certains faits avec d’autres (voir les conditionnements pavloviens chez les animaux mais aussi chez les élèves qui, dès qu’ils entendent la sonnerie, se lèvent et salivent …). Mais ce type de connaissance ne donne lieu qu’à des propositions singulières (portant sur un seul fait ou un seul individu) ou particulières (portant sur quelques faits ou individus). Une telle connaissance n’est pas inutile ou fausse mais n’est pas suffisante ; elle ne peut pas rendre compte de la totalité de nos connaissances car elles » ne suffisent pas pour établir la nécessité universelle de cette même vérité, car il ne suit point que ce qui est arrivé arrivera de même. » De quelle nature est la connaissance qui vient de l’expérience ? Elle ne peut-être que générale ce qui veut dire que l’on généralise des expériences particulières. Mais il ne faut pas confondre le général et l’universel qui est vrai d’une façon nécessaire en tout temps et en tout lieu : seule la raison nous livre des vérités nécessaires et éternelles. « Par exemple les Grecs et Romains et tous les autres peuples de la terre connue aux anciens ont toujours remarqué [par les sens]qu’avant le décours de 24 heures, le jour se change en nuit, et la nuit en jour. Mais on se serait trompé si l’on avait cru que la même règle s’observe partout ailleurs, puisque depuis on a expérimenté le contraire dans le séjour de Nova Zembla [Archipel de l’Océan glacial arctique.] Or, se tromperait encore qui croirait que, dans nos climats au moins, c’est une vérité nécessaire et éternelle qui durera toujours, puisqu’on doit juger que la Terre et le Soleil même n’existent pas nécessairement, et qu’il y aura peut être un temps où ce bel astre ne sera plus, au moins dans la présente forme, ni tout son système. » C’est pourquoi les vérités nécessaires ne dépendent pas de l’expérience ou d’une quelconque rencontre historique, temporelle. On ne peut pas saisir l’origine, contrairement à ce qu’affirment les empiristes dans l’expérience elle-même qui ne peut être que particulière mais jamais universelle et nécessaire. L’origine n’est pas de l’ordre de l’expérience phénoménale. De même Kant distingue nettement entre le commencement de nos connaissances à savoir son origine historique qui est le commencement de l’expérience et l’origine qui n’est pas dans l’expérience elle-même : « si toute connaissance débute avec l’expérience, il n’en résulte pas qu’elle dérive toute de l’expérience » (Critique de la raison pure). Ce que les empiristes confondent est l’ordre d’apparition des connaissances avec les conditions qui les ont rendues possibles.
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Mes désirs m’appartiennent-ils ? Il n’est pas difficile de trouver un paradoxe dès la première lecture du sujet. Comment ce qui est personnel (« mes », « m' ») pourraient-ils échapper à mon appartenance ? Comment ce qui est mien, propre, pourrait-il être étranger ? Ne serait-ce pas la marque d’une aliénation propre au désir ? Tout le sujet reposera néanmoins sur les différents sens que l’on pourra donner à la notion d’appartenance? Quelles sont les conditions qui rendent possible l’appartenance ?