« La science a beaucoup d’ennemis déclarés, et encore plus d’ennemis cachés, parmi ceux qui ne peuvent lui pardonner d’avoir ôté à la foi religieuse sa force et de menacer cette foi d’une ruine totale. On lui reproche de nous avoir appris bien peu et d’avoir laissé dans l’obscurité incomparablement davantage. Mais on oublie, en parlant ainsi, l’extrême jeunesse de la science, la difficulté de ses débuts, et l’infinie brièveté du laps de temps écoulé depuis que l’intellect humain est assez fort pour affronter les tâches qu’elle lui propose. Ne commettons-nous pas, tous tant que nous sommes, la faute de prendre pour base de nos jugements des laps de temps trop courts ? Nous devrions suivre l’exemple des géologues. On se plaint de l’incertitude de la science, on l’accuse de promulguer aujourd’hui une loi que la génération suivante reconnaît pour une erreur et remplace par une loi nouvelle qui n’aura pas plus longtemps cours. Mais ces accusations sont injustes et en partie fausses. La transformation des opinions scientifiques est évolution, progrès, et non démolition. Une loi, que l’on avait d’abord tenue pour universellement valable, se révèle comme n’étant qu’un cas particulier d’une loi (ou d’une légalité) plus générale encore, ou bien l’on voit que son domaine est borné par une autre loi, que l’on ne découvre que plus tard ; une approximation en gros de la vérité est remplacée par une autre, plus soigneusement adaptée à la réalité, approximation qui devra attendre d’être perfectionnée à son tour. Dans divers domaines, nous n’avons pas encore dépassé la phase de l’investigation, phase où l’on essaie diverses hypothèses qu’on est bientôt contraint, en tant qu’inadéquates, de rejeter. Mais dans d’autres nous avons déjà un noyau de connaissances assurées et presque immuables. » Freud

L’avenir d’une illusion (1927).

Pour ne pas être victime de la paraphrase, il est conseillé, après avoir lu et analysé longuement le texte proposé, de le transformer en une seule question, mieux en un seul sujet, à la façon d’un intitulé de dissertation. Pourquoi faire cela ? Si l’on est capable de le faire, on montre au correcteur que l’on a compris LA [et non pas LES] question du texte et on disposera d’une problématique qui structurera et animera tout votre commentaire.

Proposition de question : Faut-il croire en  la science ? L’intérêt d’introduire la notion de croyance permettra, dans la rédaction du devoir, de faire apparaitre la différence de nature qui, pour Freud, existe entre la foi de nature religieuse et la pratique de la science qui ne  procède que par un travail progressif de la raison. De plus, parler de croyance, c’est adopter le point de vue de ceux qui sont les plus critiques envers la science auxquels Freud répond dans ce texte. Enfin, sans le dire explicitement, Freud, en exposant les différents éléments du travail des sciences, répond en même temps aux affirmations des croyants. Pour mieux comprendre et commenter le texte il peut être intéressant de dégager les présupposés qui constituent, selon Freud, la foi religieuse :

Caractéristiques de la foi religieuse selon Freud :

  • Donne de l’assurance, de la certitude et du sens à tout ce qui est
  • Ne nécessite pas de temps et d’histoire pour s’imposer à l’esprit
  • Donne une vérité absolue

 

Quelles sont les critiques envers la science :

-ruiner l’intensité de la foi religieuse et même de ruiner ses fondements, ses raisons

– les lumières apportées par la science sont limitées.

– les vérités scientifiques seraient constamment remises en question ; il y aurait une caducité des vérités qui nous plongerait dans le relatif et l’incertitude

 

Réponse de Freud aux critiques de la science par la foi religieuse :

  • On ne peut faire apparaître les apports de la science qu’u cours du temps et de l’histoire (ce n’est pas l’immédiateté que fournit la croyance religieuse)
  • La vérité scientifique est construite par rectifications progressives
  • La progression des sciences n’annuleraient pas les lois précédentes mais les intégreraient comme lois particulières d’une synthèse plus générale, mieux, universelles : exemple de la loi de l’attraction universelle de Newton qui unifie au sein d’une même théorie, la loi de la chute des corps, les lois de la mécanique terrestre et celles de la mécanique céleste.
  • Il existe des domaines dans lesquels les sciences obtiennent de vérités stables et quasiment définitives.

En conclusion, on voit aujourd’hui renaître des critiques des sciences au nom d’une foi religieuse. Ce texte de Freud est toujours d’actualité pour mieux comprendre ce qu’est la science.