Présentation.

L’essentiel de ce qui va suivre : l’introduction d’un nouvel instrument technique (la vidéo dans l’arbitrage du football) donne l’occasion de réfléchir sur la technique et la façon dont les hommes la vivent et, surtout, la pensent. La question est à la fois épistémologique (obtiendra-t-on une meilleure connaissance de ce qui a été?), éthique et existentielle (est-elle bonne pour l’ensemble (joueurs, arbitres, spectateurs) de ceux qui participent émotionnellement à cette activité ?), anthropologique (comment penser l’essence de l’homme confrontée à la technique ?) et métaphysique (que devient la liberté de décision des acteurs et le réel se réduit-il à une suite indéfinie d’interprétations que la technique pourrait ou ne saurait pas clore ?)

Dans un premier temps, nous montrerons l’intérêt que la philosophie, notamment celle de Merleau-Ponty, a porté au joueur de football en analysant la façon dont les corps sont présents au monde et aux autres dans la dynamique de l’action. Les joueurs font-ils appel à leur faculté de juger pour évaluer et leur position et celle des autres joueurs ? N’y a-t-il pas plutôt une compréhension immédiate, intuitive qui n’exige pas de passer par leur entendement ?

On rappelle, dans un deuxième temps, ce que les Grecs, plus particulièrement Platon, pensaient de la technique. Celle-ci, prothèse extérieure au sujet, le dépossède de son autonomie, de sa liberté et provoque une aliénation puisqu’on place en elle, à l’extérieur, ce qui était auparavant en nous : elle crée une dépendance asservissante. Elle est même ce qui apporte la mort de ce qui était le plus vivant en nous.

On confronte les thèses et arguments de Platon à ceux qui sont avancés à propos de l’introduction de l’arbitrage vidéo au football. Les mutations scientifiques et techniques intervenues depuis ont-elles modifié la façon de penser la technique dans ses rapports à une activité humaine ? Le plus inattendu est de constater que, sans le savoir, les arguments avancés restent … grecs, plus précisément platoniciens ! On n’apprend plus guère le grec mais … on le récite mécaniquement et inconsciemment.

Bref, on se propose, à partir d’un débat qui semble insignifiant (l’introduction de l’arbitrage vidéo dans le football) de parcourir différents champs comme ceux de la technique, de la perception, des différentes façons de penser notre rapport au monde et au corps, et de l’anthropologie pour mettre à jour les présupposés des arguments avancés.

 (à suivre ici)