Série L :
Sujet 1 – Percevoir, est-ce savoir ?
Sujet 2 – Le sentiment moral peut-il être éduqué ?
Sujet 3 – Commentaire de texte
« La plupart de ceux qui ont écrit touchant les républiques, supposent ou demandent, comme une chose qui ne leur doit pas être refusée, que l’homme est un animal politique (…) né avec une certaine disposition naturelle à la société. Sur ce fondement-là ils bâtissent la doctrine civile ; de sorte que pour la conservation de la paix, et pour la conduite de tout le genre humain, il ne faut plus rien sinon que les hommes s’accordent et conviennent de l’observation de certains pactes et conditions, auxquelles alors ils donnent le titre de lois. Cet axiome, quoique reçu si communément, ne laisse* pas d’être faux, et l’erreur vient d’une trop légère contemplation de la nature humaine. Car si l’on considère de plus près les causes pour lesquelles les hommes s’assemblent, et se plaisent à une mutuelle société, il apparaîtra bientôt que cela n’arrive que par accident et non pas par une disposition nécessaire de la nature. En effet, si les hommes s’entr’aiment naturellement, c’est-à-dire, en tant qu’hommes, il n’y a aucune raison pourquoi chacun n’aimerait pas le premier venu, comme étant autant homme qu’un autre ; de ce coté-là, il n’y aurait aucune occasion d’user de choix et de préférence. Je ne sais aussi pourquoi on converserait plus volontiers avec ceux en la société desquels on reçoit de l’honneur ou de l’utilité, qu’avec ceux qui la rendent à quelque autre. Il en faut, donc venir là, que nous ne cherchons pas de compagnons par quelque instinct de la nature ; mais bien l’honneur et l’utilité qu’ils nous apportent ; nous ne désirons des personnes avec qui nous conversions, qu’à cause de ces deux avantages qui nous en reviennent.
Thomas Hobbes, Le Citoyen (1642).
Série ES :
Sujet 1 – Pour être soi-même, faut-il se différencier des autres ?
Sujet 2 – Désobéir, est-ce nécessairement mal agir ?
Sujet 3 – Commentaire de texte
Une langue suppose une suite de pensées, et cest par cette raison que les animaux n’ont aucune langue. Quand même on voudrait leur accorder quelque chose de semblable à nos premières appréhensions* et à nos sensations grossières et les plus machinales, il paraît certain qu’ils sont incapables de former cette association d’idées, qui seule peut produire la réflexion, dans laquelle cependant consiste l’essence de la pensée. C’est parce qu’ils ne peuvent joindre ensemble aucune idée, qu’ils ne pensent ni ne parlent, c’est par la même raison qu’ils n’inventent et ne perfectionnent rien. S’ils étaient doués de la puissance de réfléchir, même au plus petit degré, ils seraient capables de quelque espèce de progrès ; ils acquerraient plus d’industrie ; les castors d’aujourd’hui bâtiraient avec plus d’art et de solidité que ne bâtissaient les premiers castors ; l’abeille perfectionnerait encore tous les jours la cellule qu’elle habite : car si on suppose que cette cellule est aussi parfaite qu’elle peut l’être, on donne à cet insecte plus d’esprit que nous n’en avons ; on lui accorde une intelligence supérieure à la nôtre, par laquelle il apercevrait tout d’un coup le dernier point de perfection auquel il doit porter son ouvrage, tandis que nous – mêmes nous ne voyons jamais clairement ce point, et qu’il nous faut beaucoup de réflexions, de temps et dhabitude pour perfectionner le moindre de nos arts.
Diderot, Encyclopédie, 1751
* appréhensions : ici les actes par lesquels l’esprit comprend.
Série S :
Sujet 1 – Une société sans religion est-elle possible ?
Sujet 2 – Connaître le réel, est-ce le dominer ?
[attention au concept de réel qui est l’un des plus difficiles à aborder, surtout quand il est précédé de l’article défini!]
Sujet 3 – Commentaire de texte
Il y a ( …) des circonstances où les actes qui nous paraissent les plus dignes d’un homme juste, de l’homme que nous appelons homme de bien, se transforment en leurs contraires ; rendre un dépôt, faire une promesse et d’une manière générale accomplir ce qu’exigent la sincérité et la bonne foi, ce sont des devoirs que, dans certains cas, il devient juste d’enfreindre et de ne pas observer. Il convient de se rapporter ici aux fondements de la justice que j’ai posés au début : d’abord ne pas nuire à quiconque, ensuite être au service de l’intérêt commun. Quand les circonstances changent, le devoir change lui aussi, et il n’est pas toujours le même : il peut arriver que tenir une promesse convenue soit nuisible ou à celui à qui on a fait la promesse, ou à celui qui a promis. (…) Il ne faut donc pas tenir les promesses qui sont nuisibles à ceux à qui on les a faites ; et également, si elles nous nuisent plus qu’elles ne servent à celui à qui nous les avons faites, il n’est pas contraire au devoir de préférer le plus au moins : par exemple, si l’on s’est engagé envers quelqu’un à venir en personne pour l’assister, et si dans l’intervalle on a un fils qui tombe gravement malade, il n’est pas contraire au devoir de ne pas faire ce qu’on avait dit qu’on ferait ; et c’est plutôt celui à qui l’on a fait la promesse qui s’écarterait de son devoir s’il se plaignait d’avoir été abandonné.
Cicéron, Traité des devoirs, (1er s. av. JC.)