La question de la technique donne souvent lieu à un grand nombre de banalités et même, osons le dire, de délires qui sont à la hauteur de l’ignorance qu’on lui porte traditionnellement. Parmi les banalités, la plus répandue est celle qui affirme une neutralité de la technique (comme de la science). Cette neutralité supposée permet de dire que la technique et la science ne seront que ce que l’homme veut bien en faire. Cette idée de neutralité et de mise à disposition de l’homme de la technique présuppose qu’elle est extérieure à l’homme. Or il n’y a pas d’idée aussi naïve que celle-ci car s’il est vrai que les techniques sont des produits de l’activité de l’homme qui extériorise ses possibilités, une fois produites, elles forment un tout avec celui qui les a faites. C’est pourquoi, il ne faut pas dire que l’homme a des techniques mais qu’il est les techniques qu’il a produites dans la mesure où le propre de l’homme est de s’approprier, de faire sien, tout ce qui est de l’ordre de la culture. Il n’y a pas de société humaine sans technique et si l’on veut en donner les traits essentiels, on peut dire que la technique a pour caractéristique essentielle d’être de l’ordre de la culture, de devoir être apprise (par conséquent, elle n’est pas innée), d’instaurer un système qui met l’homme à l’écart de l’effet direct de la nature (ainsi les habitations et les vêtements qui sont des produits de la technique constituent un microclimat corporel distinct de la température extérieure).
S’il n’y a pas de société sans technique, c’est que l’homme n’est pas technicien par hasard ou par accident mais par essence. L’homme est un être de l’artifice, sans qualités originelles, de telle sorte qu’il est ce qu’il se fait. Ceci peut être saisi aussi bien dans la réalité effective que dans les représentations mythiques que l’homme se donne de lui-même (mythe de Prométhée et d’Epiméthée, Genèse).
Cours :
I) Eléments de définition de la technique.
II) La pensée grecque de la technique : le mythe de Theuth de Platon.
III) Technique et science
IV) Technique et nouvelle façon de penser.
V) Technique et définition nouvelle de l’homme.
VI) Technique, éthique, morale.
VII) Technique et ontologie.