Comment aborder l’intitulé d’une dissertation ? Toute l’année, les professeurs ont parlé de la fameuse problématique à mettre en place pour tout sujet. Mais, pour un grand nombre de candidats, cette problématique reste la veille de l’épreuve toujours … problématique. Nous allons ici montrer une méthode parmi d’autres (voir ici ) pour obtenir sans trop de difficultés et d’efforts un résultat.

De la méthode avant toute chose…

Juste un mot sur le concept de méthode qui est parfaitement adapté à ceux qui recherchent un médicament qui pourrait faire disparaître l’angoisse qui les étreint à l’idée d’affronter l’épreuve de la dissertation, car il signifie originairement (1537 !) une «manière particulière d’appliquer une médication». Et tous ceux qui ont entendu parler d’un certain Descartes et son Discours de la méthode savent  que ce concept de méthode signifie aussi, route, chemin, plan qui permet de conduire à un but. Ainsi la méthode est un ensemble de procédés raisonnés pour faire quelque chose. Et si ces procédés sont raisonnés, cela montre que, contrairement à ce que les rumeurs colportent, faire une dissertation de philosophie ne consiste pas à écrire de façon aléatoire ce qui vient à l’esprit et, inversement, qu’il n’y a pas d’arbitraire dans la façon de noter une copie.

Quel est donc ce chemin qui permet, sans guère d’effort, de problématiser le sujet et d’obtenir en même temps la moyenne ? Nous allons le montrer en lisant quelques sujets tombés en 2017 à Pondichéry et au Liban !

Trouver un paradoxe, une contradiction dans l’intitulé.

Le premier piège à éviter est celui qui consiste à croire que LA question est posée par le fait même que l’intitulé est toujours formulé de façon interrogative. C’est croire que l’intitulé est la question. Or c’est au candidat de poser la question !!! Pour ce faire, il faut (et c’est possible dans la quasi-totalité des cas) s’étonner devant l’intitulé. Et être capable de s’étonner, c’est la condition de possibilité de la philosophie qui est exigée du candidat : « Ce qui, à l’origine, poussa les hommes aux premières recherches philosophiques, c’était, comme aujourd’hui, l’étonnement. » (Aristote).

Comment s’étonner ? Il suffit de chercher dans l’intitulé une contradiction, un paradoxe et on peut même s’étonner du fait que l’intitulé semble ne pas poser de problème !

Appliquons cette méthode à deux sujets déjà tombés en 2017.

Suis-je le sujet de mon désir ? (Pondichéry, 2017)

On ne peut qu’être frappé par tous les éléments qui mettent l’accent sur ce qui relève du personnel, du subjectif : « je », « sujet », « mon ». Comment ce qui est mien pourrait-il ne pas être mien ? Comment ce qui m’est propre pourrait-il être autre, étranger ? Il y a là une contradiction majeure étonnante qui constitue une problématisation de l’intitulé. On pourrait reformuler ainsi la problématique que nous venons de découvrir au cœur même de l’intitulé :

Et si l’on pousse l’analyse un peu plus, on peut énoncer d’autres contradictions qui résident au cœur même de l’intitulé. Le « je » du « je suis » n’est autre que le sujet de la phrase qui nous est proposée ; or on nous demande si ce sujet est vraiment le sujet du désir ? N’est-ce pas une contradiction absurde qui consiste à affirmer que le sujet qui se pose comme sujet ne serait pas le sujet qu’il pose ? Et cette deuxième contradiction débouche sur une troisième qui réside dans le fait que ce qui est mien (mon désir) ne serait pas mien !

Nous ne voulons pas ici traiter le sujet (sic) mais indiquons seulement une piste qui permettrait de résoudre en partie les contradictions énoncées en jouant sur un autre sens du concept de sujet. Etre sujet peut signifier être soumis à une autorité souveraine. Et si nous appliquons ce sens à l’intitulé proposé, loin d’être le maître, le souverain de mon désir, ne serait-ce pas le désir qui m’oblige ou me contraint (c’est à voir) à me soumettre comme sujet à sa loi ? Forçons le trait pour mieux comprendre : de même que l’esclave est le sujet de son maître, ne serais-je pas le jouet du désir qui m’aliène, me fait sortir de mon être, de ma subjectivité, de ma liberté ? On voit que l’enjeu de la question porte sur la liberté.

2° Vit-on en société pour satisfaire ses désirs ? (Liban 2017)

Une société des abeilles pourrait-elle exister si, en son sein, chaque abeille ne recherchait qu’à satisfaire ses propres besoins ?

 

La première lecture du sujet met en évidence la préposition « pour » qui nous invite à nous interroger sur la finalité ou mieux, la raison qui nous fait vivre en société. Il nous faut chercher dans cet intitulé un paradoxe ou une contradiction qui nous permettrait de poser un problème. On remarque déjà une opposition entre le « on » qui renvoie à l’ensemble des hommes et l’adjectif possessif (« ses ») qui se rapporte ici à un seul sujet et son propre désir. Comment articuler une finalité qui serait en même temps celle de chacun et celle de tous ?  Et ce problème est redoublé par l’opposition entre « société » et « ses désirs ». Car la société se caractérise par le fait de mettre en commun des modes de vie, des règles, des lois. Or cette vie en groupe qui est la condition de possibilité d’existence de la société n’est-elle pas en pleine contradiction avec le fait d’attendre de cette vie en commun la satisfaction de désirs qui me sont propres et particuliers ? A contrario, si chacun ne cherche qu’à satisfaire ses propres désirs, n’est-ce pas mettre en péril la société ?

Maintenant que vous avez compris comment problématiser un intitulé, exercez-vous sur ce sujet tombé lui aussi cette année 2017 au Liban : Les connaissances nous aident-elles à vivre ? (Liban 2017)